Cinq anglicismes à bouter hors de la langue française

 
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«Spoiler», «fitter», «date»… Ces mots anglais pullulent dans la langue française. Et nous font saigner les oreilles. Florilège.

Les anglicismes ont la peau dure. Tel ce moustique qui s’acharne à vibrer à nos oreilles la nuit, avec un son qui rendrait fou le plus tenace des hommes, ils s’accrochent à toutes nos phrases. On passe un «call» avec son «boss», on s’apprête pour un «date», et on va faire un «running» avant d’aller «bruncher» dans un «street food». Le «franglais» est viral. Il endommage la langue de Molière, riche d’une constellation d’équivalents français. La rédaction revient sur ces nuisibles.

● «Fitter»

«Ils ont bien fitter tous les deux». Cet anglicisme a franchi nos frontières avec forces et fracas. Il vient de l’anglais «to fit», qui signifie «convenir». En tant qu’adjectif, «fit» veut dire «aller à merveille», «être parfaitement adapté». Mais rappelons que nous disposons d’’adjectifs capables de traduire cette idée: «ils vont bien ensemble», ou «ils s’entendent bien». Remplaçons donc la phrase: «j’ai un bon fit avec elle» par: «j’ai un bon contact».

● «Date»

Employer cet anglicisme au pays du romantisme est un comble. Le vocabulaire français est pourtant riche de mots et de jolies métaphores pour parler de l’amour. «Date» en anglais signifie «rendez-vous». Il est d’autant plus dommage de bouder cet équivalent que notre «rendez-vous» galant est si apprécié de nos voisins anglophones qu’ils le disent eux-mêmes… en français! Rendons justice à la langue de Musset, et parlons notre langue! Surtout s’il s’agit d’amour…

● «Pitch»

«Je te fais mon pitch et tu me fais un feed-back». Ce mot fuse dans les entreprises, notamment lors des présentations de projet. On l’entend de plus en plus, dans un pays que certains voudraient transformer en«start-up nation» . Il est emprunté au vocabulaire de la publicité, où il désigne «une démonstration faite par une agence sur les services qu’elle peut offrir, le mot pitch est actuellement en vogue dans quelques émissions télévisées de divertissement», ainsi que le note la Commission générale de terminologie et de néologie. Il signifie littéralement: «bref résumé du scénario d’un film, d’un livre», selon le Robert (l’industrie du cinéma français l’emploie d’ailleurs sans modération). Ses nombreux équivalents français ne manquent pas: résumé, condensé, abrégé, argument, ou tout simplement présentation… «avec toutes les nuances d’expression que permet la diversité française», souligne la Commission.

● «Spoiler»

Le verbe anglais to spoil, «gâcher, abîmer», est issu de l’ancien français espoillier, lui-même emprunté au latin spoliare, d’où nous viennent les formes actuelles «spolier» et «dépouiller». «Le verbe spoiler est un croisement bâtard entre l’anglais, par son radical, et le français, par sa terminaison», souligne l’Académie française. Face à l’invasion massive de cet anglicisme, la Délégation Générale à la langue française et aux langues de France propose le néologisme «divulgâcher» (mot-valise construit avec «divulguer» et «gâcher»). Il décrit le fait (infâme) de gâcher pour un lecteur ou un spectateur l’effet de surprise en révélant l’intrigue d’une œuvre. Un «spolier» peut aussi se traduire par «divulgâcheur». Si l’on n’est guère à l’aise avec ce mot, il suffit de dire: «ne me gâche pas le plaisir», «ne me raconte pas la suite», ou «ne dis rien, ne raconte pas le dénouement».

● «Customiser»

Nous devons cet anglicisme au monde de l’automobile. Les sages révèlent que l’anglais to customize, soit: «faire sur commande, personnaliser», est dérivé de custom, «coutume, habitude», puis «clientèle», lui-même dérivé de l’ancien français custume. Pourquoi user de l’anglais quand nous avons des formes de même sens en français? Au lieu de dire «customiser son appartement» ou «customiser sa voiture», privilégions le mot «personnaliser» ou la formule: «modifier selon ses goûts».